Dis-moi ce que tu consommes, je te dirai qui tu es. La consommation forge notre identité et présente une dualité, selon Thibaut de Saint-Pol. Côté pile, « elle crée du lien social puisqu’elle témoigne de l’appartenance à des groupes », citant l’exemple d’un site de rencontre pour les personnes intolérantes au gluten. Côté face, elle entraîne des inégalités, notamment en matière d'alimentation (soins bucco-dentaires, obésité) et de mobilité (urbains/ruraux).
À ce constat se greffent les profonds changements qui traversent la société : révolution numérique, transformation des valeurs, avènement des loisirs… Les achats sur internet, la livraison à domicile ou encore le visionnage de séries au détriment du cinéma ont ainsi gagné les habitudes de consommation, exacerbées par la crise sanitaire.
« Les Français en sont sortis fatigués et démotivés », d’après Jérémie Peltier*, qui observe « une perte de sociabilité encore plus marquée parmi les 15-34 ans, plus sédentaires et repliés sur le cocon privé ». Certaines marques ont retranscrit cet air du temps dans leurs slogans : Vous avez la flemme, nous avons la flamme (agroalimentaire) - Avec nous, cultivez l’art d’avoir la flemme (livraison à domicile).
« La France du guichet est en première ligne ! »
Le consommateur est devenu plus informé, donc plus exigeant, grâce au web (avis, notes, comparatifs en ligne…). Le service public en fait de plus en plus les frais : « La France du guichet est en première ligne, poursuit Jérémie Peltier. C’est un effet pervers de notre société centrée sur le client : il veut tout, tout de suite. » Cet état d’esprit, plus affirmé dans la jeunesse, interroge « le rapport aux impôts, donc à la cohésion sociale » s'inquiète Thibaut de Saint-Pol.
Et le travail, dans tout cela ? Il est devenu moins central dans les motivations des Français. Les jeunes plébiscitent des activités qui font sens et des entreprises engagées. Ils demeurent cependant « des vieux comme les autres dans leurs aspirations, sourit Jérémie Peltier : une vie de famille épanouie et un logement dont ils seront propriétaires ».
Ce débat riche d'enseignements a ensuite été élargi par les délégués à d'autres horizons : la contradiction entre numérique et écologie, le bonheur et le bien-être, l’économie sociale et solidaire…